Texte

Avez-vous remarqué1 à quel point la rue Yonge, la nuit, en particulier au sud de la rue Gerrard, ressemble à Broadway à New York ? Le tronçon entre les rues Gerrard et Shuter rappelle le secteur de la piquerie qui borde Times Square, tandis que la partie au sud de Shuter s’embellit à l’image de Broadway dans les années 1950… L’effet cumulatif des lumières vives, du bruit et des arnaqueurs peut sembler vulgaire, mais on ne peut pas dire que les bars en soient entièrement responsables. Certains, comme le Bermuda, le Steele’s et le Colonial, que j’ai particulièrement remarqués, ont dépensé beaucoup d’argent pour aménager des « devantures » qui rivalisent avec les meilleures de ce type d’architecture moderne (Helleur 1958, 31) [traduction].2

En 1950, la chronique musicale d’Alex Barris, "The Record Album", pour le Globe and Mail de Toronto, a progressivement cédé la place à une autre intitulée "Night In, Night Out". La nouvelle rubrique continuait de passer en revue les nouveautés discographiques, mais Barris s’intéressait désormais principalement au circuit des salles de concert et de divertissement qui foisonnaient autour du centre-ville de Toronto. C’était une époque où les bars à cocktails et les trios d’artistes commençaient à s’imposer dans la vie nocturne torontoise. À cette période de l’histoire, les salles et les groupes étaient petits, voire intimes, mais ils étaient également nombreux, et Barris pouvait structurer sa chronique comme un parcours à travers une scène élargie. À mesure que les chanteurs et les trios s’installaient pour de longues séries de concerts ou des résidences (ou les terminaient), la chronique faisait état de ces lentes transitions dans l’offre de divertissements. Dans la tradition du journalisme grand public du milieu du siècle consacré à la vie nocturne, couvrir la scène des boîtes de nuit signifiait aller à la découverte des lieux et des visages nouveaux, et à la rencontre des artistes qui faisaient parler d’eux. La chronique de Barris donnait l’impression d’une promenade tranquille dans un circuit familier et convivial.

Comme toutes les scènes, bien sûr, celle-ci s’insérait dans des rapports économiques et des régimes réglementaires plus larges. Au début des années 1950, un conflit opposait le syndicat des musiciens à l’industrie des boîtes de nuit de Toronto en raison du recours croissant de ces dernières à des artistes américains, alors que de plus en plus de petits ensembles se retrouvaient sur le marché du fait de la dissolution de groupes de swing. L’Assemblée législative de l’Ontario a étendu la taxe sur les divertissements qui frappait déjà les cinémas et les salles de concert aux bars, dont les divertissements « n’étaient pas limités à la musique ». « Un comédien ajoute 15 % au prix des boissons [traduction] », rapportait le Globe and Mail, « à moins que son répertoire ne se limite à la musique. Les spectacles de magiciens, de danseurs, de jongleurs et d’autres artistes de ce type sont également soumis à la taxe [traduction] » (Globe and Mail 1950). En 1951, le gouvernement du premier ministre Frost a présenté un nouveau projet de loi visant à étendre encore plus la taxe. Elle était désormais imposée aux bars où se produisaient des chanteurs, mais non à ceux où l’on jouait de la musique instrumentale ou « d’ambiance ». « Selon l’interprétation du premier ministre, un groupe jouait de la musique d’ambiance s’il n’y avait pas de chant, de blagues, de tours de passe-passe ou autres [traduction] » (Globe and Mail, 1951). Un article d’opinion intitulé "Boiler Boom Bars" déplorait le nouveau désagrément occasionné par le bruit assourdissant des trios et quatuors instrumentaux qui rendaient la discussion pénible (Tumpane 1950).

Chaque moment historique comme celui-ci regorge d’enseignements sur le rôle de l’écriture, du droit et du commerce dans l’émergence de ces phénomènes que nous appelons « scènes ». La vie nocturne urbaine a alimenté l’essor de la presse du journalisme jaune, qui a longtemps tracé une ligne instable entre deux mondes, celui du monde des célébrités transnationales d’une part et celui des péchés et vices nocturnes locaux de l’autre. Sur ce tracé, l’histoire des formes de divertissement a entrecroisé le mélange unique de criminalité et de culture, de régime juridique et de cadre moral propre à chaque ville. La structure de la culture des vedettes s’incarne tout entière dans les deux visages des boîtes de nuit, l’un regardant en avant, vers le domaine de la sociabilité publique, l’autre tourné vers l’arrière et les univers plus sombres de la criminalité, du vice et de l’économie nocturne. La culture des tabloïds des années 1950 et 1960 était obsédée par l’hypocrisie qui est au cœur de cette structure ; dans ses versions les plus irrévérencieuses (comme celle du magazine Confidential), elle ne cessait d’ébruiter les liens entre la réussite publique et la corruption privée.

Le traitement journalistique de la vie nocturne a souvent été fidèle à une ou deux formes discursives profondément ancrées. L’une d’elles, pratiquée de manière célèbre par Walter Winchell dans ses chroniques et ses émissions de radio, consiste en une série d’éléments disparates. L’utilisation par Winchell des points de suspension (dans ses chroniques de presse) ou le son des clics de télégraphe (à la radio) pour séparer des nouvelles brèves pourrait être qualifiée de résolument moderniste et urbaine, une manière d’utiliser les mots qui évoquait l’image d’« un homme klaxonnant dans un embouteillage [traduction] » (Ben Hecht, cité dans Gabler 1994, 80). Dans les chroniques d’Alex Barris pour le Globe and Mail, les fragments brefs persistent, mais l’urgence télégraphique typique de Winchell a disparu, remplacée par le regard laconique d’un hipster sur une scène nocturne familière. L’autre forme récurrente dans le journalisme nocturne est la photographie candide, qui tire sa puissance en partie du contraste entre le visage familier de la vedette et le décor anonyme, mais manifestement vulgaire dans lequel elle est photographiée. La première de ces formes s’efforce de dépeindre la métonymie de la promiscuité de la vie urbaine, source inépuisable de nouvelles sensationnelles. La seconde affirme la profondeur structurelle de l’hypocrisie, rituellement réaffirmée par les images de la célébrité émergeant d’un intérieur sombre à la lumière du jour.

Aujourd’hui, les boîtes de nuit ne sont plus un sujet de prédilection pour le journalisme des grandes villes, en partie parce que le monde des célébrités semble plus dispersé et abstrait. Dès le milieu du XXe siècle, les chroniqueurs de la presse à scandale comme Walter Winchell ont élargi leur champ d’intérêt, passant du milieu restreint de la Café society des grandes villes à celui, plus prestigieux mais moins concret, des vedettes nationales et internationales. Un exemple révélateur est celui du Midnight, un tabloïd lancé en 1954 sous la forme d’un compte rendu de seize pages de la vie nocturne de Montréal. Dans les années 1960, le Midnight était devenu un magazine à scandales très populaire, toujours publié à Montréal, mais dont le contenu et le lectorat étaient désormais internationaux (Sloan 2001, 56-57). Une transformation similaire marque l’histoire du New York Enquirer qui, en 1957, a changé son nom pour devenir le National Enquirer, abandonnant son accent sur les grandes villes au profit d’une géographie insaisissable de points qui semblent être dans un entre-deux perpétuel. La Montréal Gazette, qui, jusqu’au début des années 1980, publiait une rubrique sur les potins de la vie nocturne locale, propose à présent une chronique sur les célébrités mondiales composée d’articles tirés d’Internet ou des agences de presse.

La couverture médiatique de la vie nocturne de Toronto au début des années 1950 nous rappelle que les scènes urbaines offrent des économies variables d’intensité urbaine, des relations singulières entre la voix ou la figure à l’échelle de l’humain et les formes qui l’entourent. À quel moment la musique cesse-t-elle d’être la toile de fond d’une conversation ou d’un repas pour devenir un divertissement ? La présence d’une voix chantée suffit-elle à entraîner une telle concentration de l’attention ? Des controverses similaires ont accompagné l’introduction des téléviseurs dans les bars ; la question de savoir s’ils constituent un divertissement public ou simplement un élément de décoration a longtemps embarrassé ceux chargés de délivrer les licences aux débits de boissons ou de faire respecter les lois sur le droit d’auteur. David Henkin et d’autres ont noté les nouveaux rapports entre le corps humain et les formes de textualité publique qui ont pris forme au XIXe siècle dans la vie commerciale de villes comme New York (Henkin 1998, 3-4). Lorsque les messages publicitaires sont deux fois plus grands que les personnes qui les regardent, ou lorsqu’une douzaine de conversations luttent contre une guitare amplifiée, la condition de la socialité change. Ces rapports contribuent à la difficulté d’analyser les scènes et de distinguer les éléments qui en constituent le premier plan de ceux qui en composent l’arrière-plan. Les pratiques que nous associons généralement aux scènes — manger, boire, danser et parler en public — impliquent une négociation permanente quant au rapport approprié entre la parole et le bruit, le bruit et la musique, l’attention et la distraction, le mouvement humain et les formes physiques qui l’entourent.

La recherche d’un juste équilibre entre les différents niveaux de sémiose urbaine se concentre souvent sur les formes ou les technologies de communication modernes et leur capacité à interrompre le flux des échanges et de la sociabilité urbaine. L’hostilité du public envers les utilisateurs de radiocassettes portatifs, de baladeurs ou de téléphones portables au début de l’introduction de chacun de ces appareils était focalisée sur la mesure dans laquelle on pouvait perturber — ou s’éloigner — de la combinaison en apparence plus naturelle de voix, de sons et de musique qui composent le paysage sonore urbain. Dans toutes ces controverses, les enjeux de nuisance publique se mêlent maladroitement aux idées préconçues sur la citoyenneté urbaine et sur les formes de participation qu’elle suppose aux niveaux les plus banals. En 1971, après avoir réussi à faire interdire les kiosques à journaux dans les rues de Montréal, le maire Jean Drapeau a déclaré aux auditeurs d’une station de radio qu’il espérait également supprimer les cabines téléphoniques et les boîtes aux lettres des espaces publics de la ville (Montréal Gazette 1971, 3). Tous ces éléments étaient d’après lui laids, mais il convient de noter que chacun d’entre eux favorisait des formes de communication médiatisée souvent considérées comme nuisibles à la socialisation interpersonnelle dans les rues de la ville.

En termes simples, la ville offre le brassage de personnes et de pouvoir, d’attention et d’anonymat, d’argent et de marchés qui est indispensable à l’émergence d’une véritable scène culturelle. Elle est à la fois contenu et contexte, cause et effet, créatrice et destructrice (Hume 2001) [traduction].3

La place de la « scène » dans l’analyse culturelle semble éternellement perturbée par la diversité des tâches qu’elle est appelée à accomplir. Quelle est l’utilité d’un terme qui désigne à la fois l’effervescence de notre bar préféré et l’ensemble des phénomènes globaux entourant un sous-genre de la musique heavy metal ? Une brève étude du magazine Billboard, spécialisé dans l’industrie musicale, sur une période de cinq ans, a révélé des références à « la scène musicale de Los Angeles [traduction] », à « la scène new wave de Los Angeles [traduction] », à « la scène nationale des clips musicaux [traduction] » et à « la scène de la musique de variété en général [traduction] » (Billboard 1982, 44 ; 1981, 55 ; 1986, 9 ; 1983, NM1). Ici, comme ailleurs, le terme « scène » décrit des unités dont l’échelle et le niveau d’abstraction sont très variables. Il est utilisé pour circonscrire des groupes d’activités très locaux et pour donner une unité à des pratiques disséminées partout dans le monde. On s’en sert à la fois pour désigner la sociabilité face à face et comme synonyme facile de communautés de goûts virtuelles et mondialisées.

Le terme « scène » se maintient dans l’analyse culturelle pour plusieurs raisons. D’une part, il permet la désignation par défaut d’unités culturelles dont les limites précises sont invisibles et élastiques, et ce, de façon efficace. Le terme « scène » est utile, car il est flexible et non-essentialiste, n’exigeant de ceux qui l’utilisent rien de plus que d’observer une cohérence floue entre des ensembles de pratiques ou d’affinités. Pour les chercheurs qui s’intéressent à la musique populaire, le terme « scène » permet de dissocier les phénomènes étudiés des unités plus figées et théoriquement problématiques que sont la classe sociale ou la sous-culture (même s’il laisse entrevoir la possibilité d’une réarticulation future). En même temps, le terme « scène » semble capable d’évoquer à la fois l’intimité chaleureuse d’une communauté et le cosmopolitisme fluide de la vie urbaine. À la première, il ajoute une notion de dynamisme et au second, une reconnaissance des cercles intimes et des histoires lourdes de sens qui donnent à chaque surface apparemment fluide un ordre secret. Dans son étude sur la ville de New York, William R. Taylor fait référence à ces écrivains de fiction (de Washington Irving à Damon Runyon) qui prétendent trouver le village au sein de la ville (Taylor 1992, xvi). Le concept de scène nous oriente vers des espaces marqués par des niveaux d’intimité similaires, sans pour autant nous obliger à les considérer avec nostalgie, comme les vestiges d’un monde préurbain.

Le terme « scènes », tout comme le mot « vecteur », suggère à la fois la direction d’un mouvement et son ampleur. Une scène est-elle (a) le rassemblement récurrent de personnes dans un lieu particulier, (b) le mouvement de ces personnes entre ce lieu et d’autres espaces de rassemblement, (c) les rues ou les sections le long desquelles ce mouvement se déroule (Allor 2000), (d) l’ensemble des lieux et des activités qui entourent et nourrissent une préférence culturelle particulière, (e) le phénomène géographiquement plus large et diffus, dont ce mouvement ou ces préférences sont des exemples locaux, ou (f) les réseaux d’activité microéconomique qui favorisent la sociabilité et la relient à l’autoreproduction continue de la ville ? Tous ces phénomènes ont été désignés comme des scènes. Une scène est-elle le groupe de personnes qui se déplacent d’un endroit à l’autre ? Est-ce les lieux qu’elles traversent ? Est-ce le mouvement lui-même ? (Un livre récent sur les styles musicaux au Brésil s’intitule Funk and Hip-Hop Invade the Scene, comme si une scène était un espace culturel préexistant prêt à être occupé et défini [Herschmann 2000]).

Pour poser la question plus concrètement : le Laika, la Cabane et la Casa del Popolo (bars et cafés situés sur le boulevard Saint-Laurent à Montréal) sont-ils des lieux qui accueillent des scènes préexistantes, des espaces qui produisent leurs propres scènes, des moments dans l’itinéraire d’une scène (au cours d’une nuit ou sur plusieurs années), des exemples locaux de phénomènes scéniques dont l’ampleur réelle est internationale, ou des points de réseaux d’interconnexion sociale, culturelle et économique qui constituent les véritables scènes ? Le Laika peut-il être décrit comme un avant-poste de la scène locale, à Montréal, du house français, comme le berceau de sa propre scène Laika, comme un arrêt avant de sortir en boîte le samedi soir, ou encore comme l’expression de la nouvelle scène internationale de cafés où les DJ spinnent4 des disques pour des clients assis ? Ou s’agit-il d’un nœud économique, le lieu où les universitaires francophones et anglophones spécialisés dans les études culturelles, les DJ en herbe, les graphistes, les artistes multimédias et les écrivains peuvent tous se rencontrer pour mener leurs activités dans le plus grand confort mutuel ?

Le risque que l’on court avec l’emploi du mot « scène » est que ce terme ne devienne que le nouveau concept à la mode mobilisé pour traduire l’indétermination chaotique de la vie urbaine. Il renvoie à la conception simmelienne de la ville comme lieu de stimuli et de sensations, tout en y ajoutant une préoccupation plus récente liée aux sous-cultures et aux tribalismes contemporains. Pendant une décennie, les études de musique populaire ont cherché à affiner la notion de « scène », mais celle-ci demeure difficile à cerner. Dans ma propre contribution à cet effort, j’ai tenté de définir les scènes comme des espaces géographiques précis où s’articulent de multiples pratiques musicales (Straw 1991). Comme cela arrive souvent avec les tentatives de définition, l’exercice n’a menacé ni la pertinence ni la popularité d’autres emplois du terme, la « scène hardcore internationale [traduction] » (Billboard 1994), par exemple, dont le sens spatial était très différent.

L’espace sémantique occupé par le terme « scène » s’élargit et se contracte entre deux extrêmes dans l’analyse culturelle urbaine. À l’une de ces extrémités, nous partons du paysage urbain visiblement social ; le concept de « scène » nous invite à en délimiter l’ordre sous-jacent. La désignation de scène donne de la profondeur au théâtre de la sociabilité urbaine, aux univers des restaurants, des cafés et des autres lieux de rassemblement. Appeler ces phénomènes « scènes » revient à les considérer sous l’angle de leurs logiques cachées et de leur participation au réalignement continu des énergies sociales. La description des personnes réunies dans un bar comme une « scène » présuppose que les moments de sociabilité apparemment sans but sont impliqués dans la production d’intrigues complotistes, de projets et d’identités de groupe. La notion de « scène » permet ainsi à un ordre de s’insérer dans notre perception purement esthétique de la ville, c’est-à-dire comme un espace de sensations et de rencontres théâtralisées. Grâce à elle, nous commençons à entrevoir une cartographie des régions sociales de la ville et de leurs interconnexions. En ce sens, la « scène » est une ressource dans l’élaboration d’une grammaire de l’ordre culturel.

À l’autre extrême, cependant, le terme « scène » sert à assouplir une analyse sociologique plutôt qu’à lui donner forme. Il s’agit sans doute du terme le plus élastique dans une morphologie sociale qui comprend des catégories comme le monde de l’art, le simplexe ou encore la sous-culture. Dans son article célèbre "Bureaucratic and Craft Administration of Product [organisation bureaucratique et artisanale de la production]", publié en 1959, Arthur Stinchcombe posait la question de savoir si, dans les conditions de capitalisme avancé, tous les lieux de travail tendraient nécessairement vers la rationalisation et la bureaucratisation (Stinchcombe 1959). C’était le cas pour beaucoup d’entre eux, mais Stinchcombe a constaté que le travail de construction des maisons préfabriquées d’après-guerre présentait des caractéristiques qui auraient pu être considérées comme dépassées, vestiges d’un mode de production « artisanal » ancien. Sur les chantiers de construction, les liens de parenté et d’amitié semblaient déterminer le partage des tâches et les protocoles précis pour leur réalisation. Les compétences et les connaissances étaient transmises entre les membres du lieu de travail d’une manière qui ressemblait davantage à la circulation du folklore qu’à la transmission institutionnalisée de consignes.

À un certain niveau, Stinchcombe a peut-être simplement observé (sans la nommer) l’homosocialité du travail dans le secteur de la construction. Quoi qu’il en soit, son travail a ouvert la voie à une analyse ultérieure des industries culturelles, notamment d’une tradition qui soulignait les frontières perméables de ces industries et le chevauchement du travail et de la socialité au sein d’elles (voir, par exemple, Hirsch, 1972). Dans la recherche de type historique, des réflexions similaires ont été développées rétrospectivement, comme dans le portrait que William Taylor dresse de la culture commerciale urbaine du début du XXe siècle, qu’il présente comme un lieu de mythologies localisées et d’échanges en personne (1992). On peut également voir dans ces idées une préfiguration du regard porté sur l’activité économique post-fordiste selon lequel cette activité s’inscrit dans des relations informelles et dans une attention constante accordée aux rumeurs et aux occasions. Dans l’ensemble de ces travaux, les modèles d’organisation économique ou industrielle se diluent dans une notion plus large de mondes sociaux et culturels, de phénomènes qui ressemblent à des scènes. En relisant les travaux de Stinchcombe, on peut se poser la question de savoir avec quelle lunette analytique il serait le plus utile d’observer la construction de logements : celle d’une activité économique dont il faut déchiffrer la logique organisationnelle ou celle d’une activité parmi d’autres d’une scène particulière (au même titre qu’un comportement comme boire ou recruter). À quel moment le langage typique de la sociologie organisationnelle doit-il céder la place au langage élaboré dans l’analyse des mondes créatifs, langage dont sont issues des catégories comme le « monde de l’art » de Howard Becker (Becker 1982) ou le « simplexe » à peine structuré des musiciens de studio de Nashville décrit par Peterson et White (1979) ?

Les notions de « monde de l’art » ou de « simplexe » – tout comme celles de « sous-culture » ou de « mouvement » – circonscrivent les activités et les identités de manière plus stricte que la notion de « scène ». Ce faisant, ces termes permettent-ils de résoudre le caractère insaisissable des scènes, ou se contentent-ils de réifier certaines de leurs caractéristiques transitoires ? Avec l’attention croissante portée à l’urbain dans les études culturelles, des catégories comme la sous-culture, la communauté ou le mouvement semblent de moins en moins capables de contenir la diversité des activités qui s’y profilent ou la mobilité fluide à laquelle elles participent. Le terme « scène » semble plus efficacement s’étendre pour englober ces activités. En effet, Barry Shank définit la « scène » comme « une communauté signifiante surproductrice [traduction] ». Au sein d’une scène, précise Shank, « il se produit bien plus d’informations sémiotiques que l’on ne peut rationnellement analyser [traduction] » (Shank 1994, 122). Ce qu’il faut retenir va au-delà de l’affirmation selon laquelle toutes les activités à visée pratique ou économique produisent un surplus affectif ou engendrent des conséquences imprévues. Une partie du caractère « surproductif et signifiant » des scènes réside sans doute dans leur rôle plus large dans la reconfiguration des cartographies de la vie urbaine, même lorsque les activités des scènes semblent destinées à exprimer ou à occuper des lieux très précis au sein de ces cartographies.

La méfiance à l’égard de la notion de « scène » provient souvent du fait qu’elle semble exclure toute agentivité politique viable. En effet, les théories sur la « scène » mentionnent rarement ce à quoi les scènes peuvent se heurter. (Le concept peut s’opposer à celui de « communauté » ou de « sous-culture », mais le phénomène lui-même n’a pas d’ennemis.) Si la fonction du terme se limite à contrecarrer l’essentialisme et à permettre d’assouplir les notions plus rigides d’ordre social, il ne trouvera son tranchant politique que dans le discours qui présente l’indétermination de la vie urbaine comme une remise en cause des unités bien établies. En ce sens, l’adoption du terme « scène » s’inscrirait elle aussi dans l’absorption continue (quoique jamais totale) des études culturelles dans les analyses esthétisantes de l’espace urbain. Il y a dix ans, la recherche sur l’espace semblait se dérouler sous l’influence de Foucault ou de Lefebvre, dont les postulats sur l’espace comme produit semblaient autoriser l’analyse de sites circonscrits ayant une signification claire dans la délimitation du pouvoir. L’influence croissante de Simmel et Benjamin a toutefois réorienté ce tournant spatial. Un flot incessant de travaux s’efforce désormais de cerner une réorganisation de la perception que l’on présume avoir été produite dans les conditions de la modernité urbaine.

Le concept de « scène » pourrait trouver un élan dans ce virage, comme une métaphore supplémentaire du flux et de l’excès urbains. Le sens originel du terme n’est pas trahi ici ; l’évanescence dont s’accommode la notion de « scène » l’accompagne depuis longtemps. Néanmoins, l’attrait intermittent qu’a ce concept pour les spécialistes de la musique populaire provient du sentiment qu’il contribuera à résoudre un certain nombre de questions épineuses, notamment celle des relations entre le global et le local. Tant que les gens continueront de parler de scènes trance mondiales ou de la "monster L.A. lounge scene", le terme « scène » suggérera plus que la fluidité animée de la sociabilité urbaine. Il nous oblige à examiner le rôle des affinités et des interconnexions qui, au fil du temps, marquent et régularisent les itinéraires spatiaux des personnes, des choses et des idées.

Aux États-Unis, berceau de la culture de masse, l’intellectuel ne méprise plus la mode. Il est libre de l’adopter. Depuis les Kennedy, les beautés aux grands yeux essaient de prendre un air sérieux de temps en temps et les savants de l’ordre établi de se comporter de manière farfelue. Entre autres choses, depuis la fête que Truman Capote organisa en novembre 1966 pour les 540 personnes qu’il considérait comme faisant partie de l’élite, on sait qu’un ancien professeur de Harvard comme Arthur Schlesinger, Jr. et un créateur de mode comme Oscar de la Renta font partie du même groupe de pairs. Le professeur écrit des critiques de films pour Vogue. Quant à M. Capote, il a élevé les aspirations intellectuelles d’au moins deux membres de cette « liste des personnages les mieux habillés », Mme William S. Paley et la princesse Stanislas Radziwell. Il fit notamment découvrir à Mme Paley, l’épouse du président de la Columbia Broadcasting System, les écrits de Marcel Proust (Bender 1967, 19) [traduction].5

La scène décrite ci-dessus, exemple presque parfait de ce que Sally Banes, écrivant également sur les années 1960, appelait « les multiples possibilités d’une vision postmoderne concrète du monde [traduction]6 » (1993), confirme l’impression largement répandue que les scènes sont des phénomènes fluides et perturbateurs. Cette fluidité semble imprégner les scènes de la culture urbaine depuis le début du XXe siècle, époque à laquelle le chroniqueur mondain Maury Paul notait que « la société ne reste plus chez elle. La société sort dîner, elle sort pour profiter de la vie nocturne et elle fait tomber les barrières [traduction] » (cité dans Allen 1993, 73). Dans son histoire de la vie nocturne new-yorkaise des années 1920, Lewis Erenberg saisit les multiples sens du mot « scène » dans sa description des nouveaux cabarets-restaurants qui servaient d’espaces pour danser en public.

La piste de danse, l’absence de grandes scènes à arc de proscenium et la proximité du public assis aux tables faisaient de la salle un lieu d’activité expressive. L’ensemble du restaurant devenait le décor du spectacle, et les clients eux-mêmes ne pouvaient échapper à l’action et à la spontanéité du moment. Dans un théâtre, l’expressivité était principalement limitée aux artistes engagés. Dans le cabaret, le public et les artistes étaient sur un pied d’égalité, et l’expressivité s’étendait donc également au public (1991, 124) [traduction].7

On voit dans les nouveaux cabarets un lieu où les classes supérieures peuvent entrer en contact avec les autres, renforçant ainsi cette perception de la vie nocturne comme une forme de tourisme social qui perdure encore aujourd’hui. Les scènes du XXe siècle en général, de la Café society des années 1920 à l’East Village des années 1980, ont été présentées comme des expériences de changement social et de juxtaposition radicale. Dans les années 1960, les déplacements nonchalants dans le circuit de bars et de salons d’une ville, qui ont façonné le rythme et le style de tant de chroniques sur la vie nocturne des années 1950, ont cédé la place à des descriptions qui cherchaient à se surpasser les unes les autres dans leurs récits d’une promiscuité sociale intense et inattendue. (Andy Warhol à propos des années 1960 : « C’était amusant de voir les gens du Museum of Modern Art autant au côté de minettes branchées, que de reines de l’amphétamine et de rédacteurs de magazines de mode [traduction]. ») L’article de La Presse décrivant le bal des débutantes qui s’est déroulé à Montréal à la Place des Arts en 1968 célébrait la diversité de la foule dans laquelle se trouvaient des mannequins, des groupes de rock, des personnages de la haute société et Pierre Trudeau (La Presse 1968).

Malgré la tentation de voir dans la scène un élément perturbateur, j’insisterai sur leur capacité à ralentir le roulement constant de nouveautés urbaines. Les scènes sont souvent vécues comme une effervescence, mais elles créent également des sillons dans lesquels s’ancrent les pratiques et les affinités. Les rencontres fortuites dans la rue ou dans les bars nécessitent souvent, pour être harmonieuses et fructueuses, la résurrection de liens ou d’intérêts communs désormais marginaux dans les autres aspects de nos vies. Dans ces rencontres, et dans leur répétition, les connaissances sont revigorées et les périphéries de nos réseaux sociaux renouvelées. Ces occasions sont comme la sédimentation d’artefacts ou de formes architecturales dans les villes ; grâce à elles, la ville devient un dépositaire de la mémoire.

Les scènes étendent la spatialisation des cultures urbaines en greffant des goûts ou des affinités à des lieux physiques. Au sein des scènes, les goûts ou les affinités s’organisent en itinéraires à travers une série d’espaces. À cet égard, les scènes absorbent (et parfois neutralisent) les énergies d’activités avant-gardistes. Les scènes régularisent ces activités en les intégrant dans les rituels du boire et du manger, ou les soumettent à la fréquence de rencontres fortuites. La fragmentation des activités musicales ou littéraires locales entre divers sites – en soi un signe de santé et de croissance d’une scène – prolongera les itinéraires nécessaires à une pleine participation à ces scènes. Dans ce processus, le spectaculaire perd de sa visibilité, dispersé dans de multiples lieux de rencontre ou de consommation. Les avant-gardes, dont les formes les plus pures se définissent sur le plan du temps et du mouvement, s’étiolent lorsque leur occupation de l’espace les transforme en un point de plus sur une carte culturelle, ou lorsque leur expansion détourne l’énergie de leurs membres vers l’exercice qui consiste à faire l’itinéraire.

La naissance de scènes au fil du temps est, à un certain niveau, le résultat de l’écart entre la vitesse à laquelle les goûts et les pratiques évoluent par rapport à celle à laquelle évoluent les lieux de rassemblement ou les sites d’activités commerciales. Les sous-cultures associées à des intérêts particuliers (la musique yéyé québécoise des années 1960, par exemple) déposent des artefacts et créent des espaces dans toute la ville, ce qui donne de l’élan à ces scènes et ralentit leur dissolution ou leur obsolescence. L’analyse de Sheenagh Pietrobruno sur la salsa à Montréal retrace avec brio le rôle de nouvelles entreprises (des bars et des écoles de danse) dans la pérennisation d’une scène vivante et en constante évolution (Pietrobruno 2001). À Montréal également, la dispersion définitive et totale d’une scène à la fois savante, artistique, musicale et journalistique de la fin des années 1980 a été ralentie par le maintien de lieux comme le bar-restaurant La Cabane, où les vestiges de cette scène (dont je fais partie) se réunissent sporadiquement et retrouvent un sentiment de cohérence scénique. S’il venait à fermer, ses éléments constitutifs auraient peu de chances de se regrouper ailleurs. Certains de ses éléments ont déjà gravité vers d’autres endroits, dans toutes sortes de directions : vers les réunions du Plateau Press Club chez Nantha’s Kitchen, vers le cercle d’anglophones d’âge mûr qui aiment prendre un verre chez Elsye’s, ou vers les groupes de mixité inédite de générations, de langues et de professions qui se créent dans des bars plus récents comme le Bily Kun.

J’ai déjà soutenu ailleurs que les scènes fonctionnent de plus en plus comme des espaces organisés contre le changement (Straw 2001). Au sein de celles-ci, des goûts et des habitudes particuliers se perpétuent, soutenus par des constellations d’établissements de petite échelle, comme les magasins de disques ou les bars spécialisés. À ce niveau, les scènes peuvent être considérées comme conservatrices, affirmant les valeurs d’une diversité dispersée dans l’espace plutôt que celles de l’obsolescence et du renouvellement périodiques dans le temps. (À cet égard également, les scènes peuvent offrir un antidote radical à une économie de l’obsolescence continuelle et des modes éphémères.) Un bilan plus utile relèverait la fréquence accrue avec laquelle les cultures d’affinités (comme celles qui se sont construites autour de la musique doom metal ou le genre drum and bass) trouvent une cohérence grâce à l’élaboration lente de protocoles éthiques à suivre par ceux qui évoluent en leur sein. Ces protocoles ont remplacé l’attitude polémique, voire combative, envers l’autre, qui caractérisait les sous-cultures spectaculaires des années 1960 et 1970. Les scènes musicales fondent leur spécificité sur une éthique de la consommation culturelle (quelle musique acheter et où ?). Autour de cette éthique fondamentale se cristallisent des normes qui régissent tout, des rituels de salutation au partage des ressources. Les normes elles-mêmes perdent de leur visibilité dans l’activité banale qu’est le fait d’offrir un verre à quelqu’un ou de discuter d’intérêts communs, mais ces activités leur permettent de se perpétuer, absorbées dans les tissus plus denses de la sociabilité urbaine.

Lorsqu’on examine la condition des villes par rapport à la nation ou à des unités transnationales, il convient de rappeler que les scènes urbaines seront presque toujours perçues comme des espaces sociaux vivants et productifs. L’effervescence qui s’en dégage persistera même lorsque la force et l’indépendance des cultures nationales auxquelles elles appartiennent seront menacées ou qu’on les laissera dépérir. Les projets nationaux visant à soutenir la diversité culturelle mondiale, par exemple, perdent leur force mobilisatrice lorsque l’expérience quotidienne de la scène de vie urbaine semble déjà offrir une telle diversité et lorsque la culture n’est plus perçue comme une ressource rare. L’avantage des scènes est qu’elles offrent des laboratoires de citoyenneté culturelle qui sont largement épargnés par le sentiment de manquement au devoir collectif que la politique culturelle nationale cherche si souvent à inculquer (Miller 1993, xi). Le danger est qu’on se serve de la richesse des scènes comme prétexte pour remettre en question la pertinence d’une analyse politique ou économique plus large de la sphère culturelle. Si, en effet, la vie culturelle semble plus riche au niveau de la base de la sociabilité urbaine, nous avons besoin de militantisme culturel pour remettre en question la complaisance des scènes et pour diffuser plus largement leurs vertus.

Bibliographie

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Notes

1 Note de la rédaction de La Revue internationale des francophonies : cet article a été publié originellement en anglais dans PUBLIC: Art | Culture | Ideas, vol. 13, no. 22/23, “Cities/Scenes,” 2001, p. 245–257 : https://public.journals.yorku.ca/index.php/public/article/view/30335/27864. La Revue internationale des francophonies remercie vivement Monsieur Will Straw, auteur de l’article, et Monsieur Zachary N. Pearl, rédacteur en chef de la revue, pour leur aimable autorisation de reproduction et de traduction en français. La traduction de cet article a été financée par les fonds de recherche de l'université de l'Ontario français alloués à la rédactrice invitée, Hela Zahar. Retour au texte

Note of La Revue internationale des francophonies : this article originally appeared in English in PUBLIC: Art | Culture | Ideas, vol. 13, no. 22/23, “Cities/Scenes,” (2001): 245–257. https://public.journals.yorku.ca/index.php/public/article/view/30335/27864. La Revue internationale des francophonies gratefully acknowledges the kind permission of Mr. Will Straw, author of the article, and Mr. Zachary N. Pearl, Managing editor of the journal, for this reproduction and its translation into French. The translation of this article was funded by the université de l'Ontario français research funds allocated to the guest editor, Hela Zahar.

2 Notice how much Yonge St. at night, particularly south from Gerrard, resembles New York's Broadway? The stretch from Gerrard to Shuter is reminiscent of the shooting-gallery area bounding Times Square, while the strip south of Shuter improves the way Broadway does in the Fifties... The cumulative effect of bright lights, noise and hustlers may be tawdry but it couldn't be said that the bars are entirely responsible. Some, like the Bermuda, Steele's and Colonial, which I noticed particularly, have spent a lot in achieving the kind of "shop-fronts" which rank with the best in that kind of modern architecture (Helleur 1958, 31). Retour au texte

3 Put simply, the city provides the crucial mix of people and power, attention and anonymity, money and markets, necessary to generate a genuine cultural scene. It is both content and context, cause and effect, creator and destroyer (Hume 2001). Retour au texte

4 Note de la rédaction de La Revue internationale des francophonies : le verbe « spinner » est un anglicisme en usage au Québec pour signifier « pivoter, tournoyer rapidement ». En France, on recourt à l’anglicisme « scratcher » pour les disques. Retour au texte

5 In the United States, the cradle of mass culture, the intellectual no longer scorns fashion. He is free to embrace it. Since the Kennedys, wide-eyed beauties try to sound serious occasionally and Establishment scholars to act silly. Among other things, the party that Truman Capote gave in November 1966 for the 540 he deemed elite indicated that a former Harvard professor like Arthur Schlesinger, Jr., and a dress designer like Oscar de la Renta are now in the same peer group. The professor writes movie reviews for Vogue. As for Mr. Capote, he has raised the intellectual sights of at least two members of the Best-Dressed List, Mrs. William S. Paley and Princess Stanislas Radziwell. He introduced Mrs. Paley, the wife of the chairman of the Columbia Broadcasting System, to the writings of Marcel Proust (Bender 1967,19). Retour au texte

6 In the United States, the cradle of mass culture, the intellectual no longer scorns fashion. He is free to embrace it. Since the Kennedys, wide-eyed beauties try to sound serious occasionally and Establishment scholars to act silly. Among other things, the party that Truman Capote gave in November 1966 for the 540 he deemed elite indicated that a former Harvard professor like Arthur Schlesinger, Jr., and a dress designer like Oscar de la Renta are now in the same peer group. The professor writes movie reviews for Vogue. As for Mr. Capote, he has raised the intellectual sights of at least two members of the Best-Dressed List, Mrs. William S. Paley and Princess Stanislas Radziwell. He introduced Mrs. Paley, the wife of the chairman of the Columbia Broadcasting System, to the writings of Marcel Proust (Bender 1967,19). Retour au texte

7 The dance floor, the absence of large proscenium arch stages, and the closeness of the audience seated at tables made the room a scene of expressive activity. The entire restaurant became the setting for performance, and customers themselves could not escape becoming involved in the action and spontaneity of the moment. In a theatre, expressiveness was limited primarily to hired performers. In the cabaret, audiences and performers were on the same level, and thus expressiveness spread to the audience as well (1991, 124). Retour au texte

Citer cet article

Référence électronique

Will Straw, « Scènes et sensibilités », Revue internationale des francophonies [En ligne], 13 | 2025, mis en ligne le 26 août 2025, consulté le 06 septembre 2025. URL : https://publications-prairial.fr/rif/index.php?id=1720

Auteur

Will Straw

Will Straw est professeur émérite James McGill en études des médias urbains à l'université McGill. Il est l'auteur de Nights in Fairyland (McGill-Queens University Press, 2025) et codirecteur de nombreux ouvrages dont Formes Urbaines (avec Anouk Bélanger et Annie Gérin, 2014) et Night Studies (avec Luc Gwiazdzinski et Marco Maggioli, 2020). M. Straw a publié plus de 200 articles sur la musique, la culture populaire et la nuit urbaine.

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